4 Juin 2023
Un film qu'on aurait aimé aimer plus.... mais dont on sort avec une impression mitigée.
En raison, en premier lieu, de son déséquilibre. Le film d'un homme de gauche ne saurait se passer d'une charge contre le colonialisme; elle est juste et intéressante; elle rappelle combien l'état français a toujours eu le chic, en Afrique noire et ailleurs, pour soutenir les gouvernements autoritaires et corrompus contre la volonté populaire.
Mais cette fin arrive comme un cheveu sur la soupe, après une très longue analyse, à la Renoir, des beautés de la vie d'expat, déconnectée du contexte politique; et là, on s'ennuie souvent ferme, comme lorsque des amis qui (ne) vous veulent (pas) du bien vous passent leurs interminables films de vacance...
L'histoire est donc contée (sauf la fin, autre déséquilibre) par les yeux de Thomas (Charlie Vauselle), le dernier d'une fratrie de trois, qui est toujours plus ou moins caché à observer les adultes (faut il s'étonner qu'il soit devenu réalisateur?) et dont la grande passion littéraire est: les aventures de Fantômette. Bizarre pour un petit garçon, non (faut il s'étonner qu'il se soit épanoui dans un autre genre?) Malheureusement cela nous vaut des saynètes aussi pénibles que ridicules. Colette, sa maman, la rêveuse Nadia Tereszkiewicz, est toujours prête à prendre son parti; son père (Quim Gutièrez), Robert(o) est autoritaire comme un espagnol, jaloux comme un espagnol -n'ayons pas peur des clichés... On sent que, doucement, le couple se désagrège.
On vit bien dans cette base militaire de l'armée de l'air, restée après l'indépendance de Madagascar; l'île est belle, protégée, heureuse, le sol de latérite est rouge, les plages interminables.... on se reçoit entre collègues, on va à la piscine, on se fait des bouffes.... mais attention: les officiers entre officiers, les sous-offs entre sous-offs -Robert n'a jamais mis les pieds au mess des officiers, et les malgaches entre malgaches, même si les relations semblent très bonnes.
Les meilleurs amis, c'est au contraire un couple qui va bien, aussi grassouillets, aussi bons vivants l'un que l'autre, les Guedj (Sophie Guillemin qui aime l'odeur du kérosène, petit clin d'oeil.... et David Serero)
Et puis il y a les nouveaux venus: Bernard (Hugues Delamarliere), troufion serveur au mess et sa petite lorraine de jeune épousée (Luna Carpiaux). Elle supporte pas cette vie de garnison; elle a le mal du pays; elle repart et, loin de se morfondre, Bernard tombe dans les bras de Miangaly (Amely Rakotorimalala). Elle est plieuse de parachute: mais pour les coloniaux, ça ne peut être qu'une pute; pire: elle lui a jeté un sort, elles font toutes ça, ces filles, madame Guedj en est sûre; là se situe un épisode qui déshonore le film, lorsque l'aumonier de la base fait un exorcisme pour désenvouter Bernard. Jamais un aumonier militaire, homme de terrain, ne ferait un truc pareil! Mais Robin Campillo doit bien servir son petit couplet anticlérical...
Bref, c'est l'heure de partir. Pour les adultes, habitués à barouder d'un poste à l'autre, c'est dommage, mais les changements d'affectation, ça reste de la routine. Pour Thomas, c'est un déchirement; il ne reverra plus son inséparable petite amie malgache, avec qui il partage sa passion pour Fantômette... Bref vous le voyez, les acteurs sont excellents, le thème intéressant.... mais on ne fait pas forcément un grand film avec des souvenirs d'enfance.