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Une analyse critique de films, livres, opéras et expositions de peinture

MACBETH à BERLIN STAATSOPER UNTER DEN LINDEN

        On est perplexe devant la distribution. Verdi ne souhaitait-il pas, pour la démoniaque Lady, une voix "laide"? Comprenons qu'il s'agissait, pour dompter les graves contraltesques du rôle, de ne pas hésiter à forcer une émission qui devait être plus terrifiante que belle. Alors, choisir une des voix les plus épanouies du moment, avec celles de la Yoncheva et de la Radvanovsky, quelle idée! Ces derniers temps, Anna Netrebko nous avait plutôt habitués à une certaine placidité tout occupée à produire du beau son.... Eh bien, elle s'est complètement investie dans le rôle, nous donnant d'elle des images inhabituelles -assise jambes écartées comme un mec dans son tailleur pantalon noir. Perfide, vindicative, puis rattrapée par la folie, il semble que la belle Anna se soit fait plaisir.... Quant aux graves, oh oui, elle les a, ces graves de poitrines si caractéristiques de l'école russe... Bref, elle est magnifique.

        Plus, sans doute, que dans les autres rôles de baryton verdien dont il s'est emparé ces derniers temps, en Macbeth, Placido Domingo reste bien un ténor barytonant..... Le souffle n'est plus tout à fait ce qu'il a été. Et alors? Homme médiocre mais sans scrupules, arriviste au petit pied, Domingo incarne totalement le chef de guerre meurtrier. Il est magique!

        Le reste de la distribution reste très loin en deça. Kwangchul Youn à la voix chevrotante n'est plus qu'un Banco qu'il vaut mieux oublier. Fabio Sartori a, par contre, la voix qu'il faut pour chanter MacDuff, mais, ténor italien rondouillard caricatural, il manque cruellement de charisme.

       Enfin, reste la mise en scène d'Harry Kupfer. Superbe. Harry Kupfer, pour moi, le plus grand (son Ring à Bayreuth et Berlin a été inoubliable; succédant à Chereau il l'a, toujours pour moi, surpassé sur bien des plans), transpose l'action dans un monde moderne -les casquettes et les uniformes exagérément galonnés et bardés de fourragères évoquent plutôt la Wermacht d'avant 40, ou alors quelque république sud américaine- en guerre. Le rideau s'ouvre sur les sorcières qui sont des souillardes dépouillant les cadavres sur un champ de bataille... Il utilise beaucoup les projections vidéos en arrière plan, magnifiques. Et, ce qui est passionnant, Arte nous diffuse à l'entracte un interview où Kupfer est confronté à son ami Daniel Barenboim. Comment ils travaillaient de concert, étayant l'action sur la musique et modelant la musique sur l'action. Tout était monté en collaboration! Plus que du respect mutuel, une symbiose.... Et on comprend ce qui ne marche pas dans la mise en scène actuelle. Un petit arrogant débarque avec son plan (éventuellement idiot) en tête, et le chef et les chanteurs doivent suivre.... étonnez vous du résultat....

       Bref, merci Arte de nous avoir permis ce bonheur là! Le spectacle sera repris en mai 2019 sans Anna, hélas! mais avec René Pape.... 

 

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