Overblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
ninidesLaux.over-blog.com

Une analyse critique de films, livres, opéras et expositions de peinture

LES TROYENS à l'OPERA BASTILLE

        ..... lieu, comme vous le savez, d'une moderne bataille d'Hernani. Comment faire pour applaudir les chanteurs tout en huant Tcherniakov?
        Les Troyens se composent donc de deux parties: La prise de Troie; puis, Les Troyens à Carthage.
        Quand le rideau s'ouvre sur la prise de Troie, et que l'action s'engage, on est pris, enthousiasmés: tout porte la marque d'un très grand metteur en scène, créatif et intelligent. Le décor est celui d'une grande ville un peu triste, avec ses HLM et ses murs délabrés, avec sur le devant, la coupe du palais royal et son salon où se prélassent Priam et sa suite, les filles en robes très colorées (pour être vues de loin n'est ce pas, Queen Elizabeth), les garçons en costume ou uniforme, on dirait la famille royale anglaise s'alignant pour une photo officielle. De l'autre côté, le peuple s'agite, agite des drapeaux, ouais, les Grecs sont partis! qui ne saute pas n'est pas Troyen! on croirait la finale d'un match de foot.  Cassandre répond à un interview télévisé, non, elle n'est pas d'accord, le pire se profile....  Des bandes défilent, comme en bas de l'écran de BFM TV, pour nous faire suivre heure par heure le déroulé des événements. Parfois une vidéo nous permet de plonger dans la profondeur des protagonistes: ainsi, le don de Cassandre aurait à voir avec le fait qu'enfant, Papa l'avait tripotée....
        Priam est un bouffi prétentieux et incapable. Et figurez vous qu'Enée a traficoté avec les Grecs (sans mesurer sans doute la portée de sa trahison) parce qu'il ne supporte plus son pontifiant beau-père. Pourquoi pas? Tout cela, on a le droit....  les mouvements de foule, la direction des acteurs, tout est bien. Veronique Gens et Paata Burchuladze  jouent les utilités, en Hécube et Priam, malheureusement pour elle (on admire sa silhouette, on aurait aimé l'entendre un peu plus chanter), tant mieux pour lui -au bout du rouleau. Stéphane Degout est excellent comme d'habitude en Chorebe, l'amoureux de Cassandre. Celle ci est interprétée avec beaucoup d'engagement par Stéphanie d'Oustrac; pas sûr que sa voix soit vraiment celle du rôle...

        Rideau. On passe aux Troyens à Carthage. Et là, c'est comme si, en s'appuyant sur notre balcon au 8ème étage pour admirer la montagne, celui ci cédait brusquement. On bascule dans l'imbécillité absolue..... Car nous voilà plongés dans l'univers d'une maison de soins post-traumatiques pour survivants de la guerre -et Didon est la reine des foldingues. D'ailleurs elle porte une couronne pour galette des rois géante et une cape en crépon violet. Certes, Didon est une traumatisée de la guerre, chassée de Tyr pour atterrir à Carthage.... Mais, reine adorée de son peuple, elle ne s'en est pas si mal tirée.... Tout cela est ridicule. Messieurs les modernes, les urinoirs et les lits médicalisés comme décor privilégié des opéras, on en a plus qu'assez! Trouvez autre chose! Y a trente ans, c'étaient les SS avec chiens policiers: c'était moins pire.... Ici le pire culmine dans des séances de jeu de rôle parmi les foldingues qui brandissent des cartons.
        Brandon Jovanovich est excellent en Enée, mais autant il était convaincant dans la première partie, autant ici il a l'air de se demander ce qu'il fait là.... Ekaterina Semenchuk empaquetée dans un ensemble pantalon /tunique façon baba cool 1970 qui la transforme en pot à tabac, pas royal du tout, a un beau mezzo, puissant, beaucoup d'engagement, mais là, elle n'est pas aidée...
        Je pense qu'on serait moins furieux si la première partie avait été moins réussie, car là, le saccage est flagrant. Vladimir Tcherniakov est engagé avec Castellucci, Guth, Warlikovski et quelques autres dans la course à celui qui a la plus grosse -capacité de provocation bien sûr, et c'est tant pis pour nous.
        Le public se console en acclamant Philippe Jordan, pourtant personnellement, je ne suis pas sûre que Berlioz lui convienne aussi bien que Wagner, en tous cas la musique m'a semblé plutôt ennuyeuse, et devant ces tonitruances, cette mort à rebondissements (Didon avale des médocs avant de se poignarder...) on rêve de Purcell et de sa fin sublime, si douce et si forte, remember me, remenber me, but, forget my fate...
       

Partager cet article
Repost0
Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :
Commenter cet article