8 Octobre 2023
Film intéressant, sympathique, qui commence super bien.... mais dont Nadir Moknèche ne sait plus ensuite que faire. D'où une succession de péripéties mollassonnes et une fin en queue de poisson. Reste une peinture d'un milieu qu'il connait bien, ces familles d'origine algérienne entre tradition et modernité.
On commence donc par une scène excellente: le mariage de deux immariables.
Saïd (Youssouf Abi-Ayad), boucher, travaille avec son père, dans une boucherie prospère, en Bretagne. Famille unie, soeurs et belle soeurs tout à fait insérées, mais.... les parents "ne savent pas" ce qu'ils ne savent que trop bien, surtout ne pas nommer la chose, ne même pas l'imaginer: Saïd n'aime pas les filles. Saïd est homo, sans aucun doute, il a d'ailleurs un amoureux qui est tout prêt à l'épouser. Vous imaginez ca? Annoncer un mariage homo à Zineb et Mahmoud (Saadia Bentaïeb et Zinedine Soualem, excellents tous les deux)....
Hadjira (la gironde Kenza Fortas), elle, a grandi à Miramas. Elle s'est mise minable sur la plage avec ses copines, elle a couché avec un dealer, s'est trouvée mêlée à un trafic de drogue, a fait de la prison. [Entre parenthèses: première invraisemblance. Une primo-délinquante mineure ne serait pas incarcérée]
Sortie de prison, la voilà métamorphosée [Ah bon? Il faudrait donc incarcérer plus souvent... Je plaisante] Elle le dit elle même, marquant une certaine lucidité "de racaille, je suis passée bigote" Elle ne quitte plus son hidjab, ne rate plus une prière.
Pourquoi ce retournement aussi brutal? On n'en sait rien, et malheureusement Moknèche ne nous aide pas à comprendre. Le fait est qu'elle n'est pas mariable, et que les mères, qui se connaissent un peu, décident de se débarrasser de ces deux poids lourds à traîner en les mariant. Rabia, la mère d'Hadjira, c'est Lubna Azabal, légèrement foldingue, qu'on est toujours contents de retrouver. Ils vont se marier, faire un beau gros garçon suivi par d'autres, et hop! Tout le monde sera content. Leur lamentable passé sera oublié.
Hadjira, passive, enfermée dans sa nouvelle piété (elle ne quitte même pas son hidjab aux repas de famille, dès fois que les beaux frères voient ses cheveux!) accepte tout. Mais pas Saïd, qui commence par fuir, puis s'enferme dans son rejet dans une autre réalité avec des applications de rencontres homos, consultations suivies de brèves étreintes peu ragoutantes...
En même temps, Saïd reste complètement lié à une vision rétrograde des femmes et du mariage, refuse obstinément que Hadjira travaille et rejette le couple de voisins d'origine musulmane dont elle aimerait faire des amis, lui qui boit du vin et elle aux décolletés provoquants... Il y a vraiment beaucoup de confusion chez ce pauvre Saïd On comprend bien que l'enfermement dans une morale sexuelle rigoriste l'a conduit à cette fuite en avant. Cela dit, combien de familles de tradition catholiques n'acceptent pas la réalité? Il y en a beaucoup encore, j'en ai peur.