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Une analyse critique de films, livres, opéras et expositions de peinture

L'ENLEVEMENT réalisé par MARCO BELLOCCHIO

Paolo Pierobon

      Eh bien.... le nonagénaire n'a rien perdu, ni de sa vigueur, ni de son anticléricalisme. Je ne sais si L'enlèvement sera le dernier film de Marco Bellocchio, mais il terminerait sur un coup de maître, car ce film est  passionnant! Pas son meilleur, peut être, sur le plan esthétique, pas le plus subtil (car très démonstratif) mais passionnant. 

     Et quelle leçon d'histoire! Car, à vrai dire, nous autres français ne sommes pas très au fait des démêlés du Pape Pie IX avec les républicains et les garibaldistes...

Fausto Russo Alesi

      Il faut se rendre compte qu'alors les états pontificaux s'étendaient jusqu'à Bologne! (là où se passera l'affaire Mortara). Et naturellement, la seule loi qui y est reconnue est la loi de l'Eglise.

Barbara Ronchi

      Et pourtant, tout avait bien commencé. Le futur Pie IX est le candidat des libéraux. Son pontificat s'annonce sous les meilleurs auspices; le nouveau Pape amnistie les prisonniers politiques, institue la liberté de la presse, s'entoure d'un conseil consultatif comprenant des laïcs, modernise les états pontificaux et certains le voient déjà comme président d'une fédération italienne unifiée.. Plus étonnant encore, au vu de ce qui suit, il libère les juifs du ghetto dans lequel on les tenait enfermés.

      Et puis, ça va se gâter quand en 1848, le roi du Piémont déclare la guerre à l'Autriche catholique. Pie IX se désolidarise alors du mouvement d'unification. Il va bien changer... Paolo Pierobon, inquiétant et doucereux, est génial dans ce rôle! Et c'est dix ans après, en 1858, alors que Pie IX a rompu avec toute forme de modernité, qu'éclate l'affaire Mortara, qui a fourni à Bellocchio l'argument de ce film, passionnant  je le répète -et quel beau pitch pour un anticlérical....

Leonardo Maltese

      Un beau jour (un triste jour plutôt) la gendarmerie pontificale débarque chez la famille Mortara, Momolo (Fausto Russo Alesi) et Marianna (Barbara Ronchi), un couple de bourgeois juifs aisés -et très pieux_, à la tête d'une nombreuse famille. Ils viennent leur retirer Edgardo, qui a alors six ans (interprété, très bien, par le petit Enea Sala, qui sait rendre le désarroi de cet enfant qui va se retrouver écartelé entre deux univers). Une ancienne servante serait venu raconter (contre dédommagement...) au cardinal Feletti, responsable de l'Inquisition (l'Inquisition! au 19e siècle.... Fabrizio Gifuni est détestable à souhait) qu'elle a baptisé le petit à l'insu des parents alors qu'il était gravement malade. Baptisé, donc catholique, donc devant être arraché à une famille juive. C'est la loi de l'église, supérieure à toute loi humaine. On se demande bien pourquoi la hiérarchie trouve bon de re-baptiser l'enfant. Douteraient ils un peu de l'informatrice?

      Arraché à ses parents, le petit garçon sera envoyé à la maison des catéchumènes pour être éduqué avec d'autres petits juifs en voie de conversion. Oh, ils sont choyés, et le petit Edgardo, mignon et intelligent, deviendra même le chouchou du pape... Le combat de Momolo et de la communauté ne servira à rien; ni les cris et les pleurs de Marianna, ni les humiliations auxquelles Momolo se soumet ne serviront; la famille ne récupérera pas Edgardo. Mais il y a pire, car la réalité sait être supérieure à la fiction, et les faits plus sadiques que l'imagination du scénariste: Edgardo devenu adulte (Leonardo Maltese) s'attachera à sa nouvelle religion au point de renier sa famille qui refuse de se convertir et deviendra missionnaire pontifical... oui, on se demande pourquoi utiliser des scénaristes quand l'histoire vous apporte, sur un plateau, de tels scénari... Belles images, scènes spectaculaires, onirisme et rêves effrayants: à voir absolument

 

 
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