KOMPROMAT réalisé par JÊROME SALLE

       Jérôme Salle réussit assez bien le mariage entre les trois aspects de l'oeuvre: le film de fugitif, genre ..... Le Fugitif, le thriller -le héros va t-il s'en sortir?- et le film politique. Dans la première partie du film, nous sommes donc chez un Costa-Gavras en gros sabots (bon, le grand Konstantinos était lui même parfois assez lourdement chaussé).

       Le film est inspiré de ce qui est réellement arrivé au Directeur de L'Alliance Française en Sibérie; mais celui ci n'a pas été associé à la réalisation, et la désavoue. Il a tiré un livre de son épopée qu'on a, du coup, très envie de lire.

       Tout part, en fait, de la bonne vieille méthode du KGB: pour tuer politiquement quelqu'un, commencer à faire courir sur sa vie privée des histoires bien glauques.... Mathieu Roussel (Gilles Lellouche, très bien) est ainsi brutalement arrêté chez lui, accusé de diffuser des images pédopornographiques et d'attouchements sur sa petite fille. Jeté dans une cellule avec une dizaine de brutes qui le tabassent aux cris de "sale pédé" dès qu'ils connaissent la raison de son arrestation, il est finalement isolé -faudrait pas qu'il meure avant d'être jugé et condamné quand même, puis assigné à domicile avec un bracelet électronique. Sa femme, avec qui par ailleurs la vie conjugale devenait impossible (mais imaginez vous devoir accompagner votre mari à Irkoutsk.... vous auriez envie de chanter la Vie en Rose tous les matins???) subit un chantage: ou bien elle confirme les attouchements, ou bien sa fille lui est arrachée pour être placée dans un orphelinat.... Il a un avocat, qui se sait bien impuissant, et qui lui souffle à l'oreille: vous aurez quinze ans; échappez vous....

       Mais pourquoi le KGB -FSB maintenant- a t-il voulu sa peau? Pourquoi s'en prendre à un personnage somme toute secondaire? Certains penseraient qu'il est en fait un espion? On n'a pas la réponse à cette question. Ce qu'on sait, c'est que Mathieu s'est attiré l'inimitié des notables locaux et tout particulièrement du directeur local du FSB en programmant dès sa prise en fonction un ballet très, très explicitement homosexuel -c'est pas très malin. Enfin, on a du mal à croire que cela ait suffi  mettre toute la machine répressive en branle... Mais les paroles de ce dignitaire sont très intéressantes, car elles rejoignent complètement la dialectique poutinienne: cette oeuvre est caractéristique du délabrement des moeurs, de l'abandon de la morale par l'Occident, face auxquels le monde slave doit se dresser....

       Le moins plausible dans tout cela est la romance avec la jolie et gironde Svetlana (Joanna Kulig), épouse autrefois très éprise d'un héros de la Tchetchenie maintenant amputé, aigri et accro aux médicaments. Toutes les scènes où intervient Svetlana, Dr Miracle au volant de sa petite auto, sont hautement improbables....

       Ah, un petit détail: si vous êtes dans la mouise, ne comptez surtout pas sur l'Ambassade de France qui est là pour maintenir de bonnes relations au plus haut niveau  mais surtout pas pour aider ses ressortissants. C'est bon à savoir!!!